Rentrez dans le rond du Kabar Jako. Jako Maron n’est plus seul derrière ses machines, le voici revenir en trio dans l’esprit qui souffle des entrailles musicales réunionnaises : le kabar. Avec lui dans ce nouveau projet, le vertigineux percussionniste Jean-Amémoutou-Laope (sati, pikèr, kayamb, tous instruments de bois et de tôle), et le chanteur Axel Sautron (issu du groupe 7Po), pour fabriquer un maloya 2.0 qui sonne comme une évidence.
A La Réunion, le kabar, c’est le lieu et le moment où se rassemblent les musiciens pour « kraz in maloya ». Plus largement, c’est la fête où la musique se joue pour de vrai. Alors le mot s’impose pour décrire le nouveau live de l’un des précurseurs de la musique électronique dans l’océan Indien. Nous sommes bien dans un kabar au sens où l’artiste a offert ses morceaux en partage pour « sortir de l’ordinateur et sentir la force des groupes de maloya », comme il le dit lui-même.
Mais ne nous trompons pas : comme sur son précédent album, le fondateur – et solitaire – « Saint-Extension », les expériences sonores restent au cœur de la création. Dans son studio de Saint-Denis, entouré d’une multitudes d’outils électro, Jako Maron continue de creuser son sillon exigeant vers un équilibre sonique qui n’appartient qu’à lui. Le musicien autodidacte faisait déjà partie des pionniers dans la production rap et ragga, puis s’empara de la liberté que lui offraient les machines pour ouvrir sa musique aux poètes, plus tard aux auteurs et metteurs en scène de théâtre qui ont trouvé dans ses morceaux les écrins et tissus qui épousaient leurs formes textuelles. En se muant temporairement en DJ Thiburce, Jako Maron s’est convaincu de la puissance du maloya traditionnel, chanté, scandé, dans des mix aux ambiances deep house. Tout le menait à ce Kabar Jako, qui plonge l’électro dans la poussière de « la kour », lieu créole qui désigne autant la terre battue devant la case en tôle que le béton de la cité. C’est dans « la kour » que se donnent les kabar, dans « la kour » que se partagent les énergies. Dans « la kour » du Kabar Jako, les sons lourds de roulèr sont électro mais les battements du cœur sont organiques.